Si l’on se réfère à ce que beaucoup pensent, les Antilles et la région Caraïbe, sont des endroits ou les populations sont exclusivement descendantes de populations africaines.
Alors, oui, une grande majorité des personnes d’origine caribéenne descendent d’esclaves africains. Puisque le nombre d’africains qui ont été déportés vers cette région du monde, est élevé, par rapport aux autres migrations humaines.
Mais général, on a souvent tendance à oublier que d’autres groupes humains sont arrivés avant ou après la présence des africains aux Antilles. De ce fait, très peu savent qu’il y a des communautés indiennes, chinoises, syriennes, libanaises, ou portugaises, dans les différents territoires de la caraïbe. Les gens n’ont pas conscience que le peuple caribéen est un mixte de toutes ces populations, qui ont été amenées à cohabiter ensemble.
L’éruption de la Montagne Pelée de Saint-Pierre (Nord de la Martinique), est l’un des événements le plus marquants de l’histoire de l’île. L’événement a eu lieu le 8 mai 1902, dans l’ancienne capitale de la Martinique.
D’après les archives de l’époque, une explosion a débuté à partir du célèbre volcan Pelée ce 8 mai 1902, vers 8h du matin. En moins de quelques minutes, l’explosion à tuée des millions d’habitants (environ 28 000 personnes).
Quelques mois avant l’événement, le volcan avait montré plusieurs signes, notamment des petites explosions ou des fumées. Les habitants de la ville auraient alors été mis au courant des risques d’une éventuelle catastrophe, mais beaucoup n’avaient pas réellement pris conscience du danger.
Pourtant, certains avaient pris en considération ces alertes. Et par le concours des circonstances, certains ont pu échapper à la catastrophe, après avoir quitté la ville pour diverses raisons. Le destin en avait décidé autrement, et c’est ce qui a sauvé de nombreux martiniquais, dont les descendants ont accepté de témoigner sur le blog.
Joëlle Adèle, et Aliyah, sont trois descendantes de rescapés de l’éruption. Leurs aïeux, qui ont survécu, ont pris le soin de leur transmettre leurs précieux souvenirs.
Tout commence il y a plusieurs semaines, lorsque ma chère belle-soeur Inès, me partage une vidéo Tik Tok. Je reçois le message sur Whats app et elle me dit que cette vidéo pourrait m’intéresser dans le cadre d’Histoire Caraïbe.
Ce Tik Tok était une vidéo qui a été réalisée par Emily Flory, une jeune caribéenne de 24 ans. Cette vidéo était un récapitulatif de l’histoire de ses grands-parents, Roisier qui était un homme noir de Martinique, et Bui-Thi-Dam une femme d’origine vietnamienne. En l’espace de quelques secondes, je suis conquise par toutes ces anciennes photographies qui avaient été regroupé dans le montage.
On pouvait y apercevoir ses grands-parents jeunes, à différentes étapes de leur vie, mais aussi leurs enfants. Sans plus trop attendre, je décide de la contacter, afin que je puisse en savoir davantage sur cette histoire.
L’article sera scindé en deux parties, car Emily répondra aux premières questions, tandis que sa maman Joséphine, a donné son point de vue dans un deuxième temps.
En effet, lorsque j’ai proposé à Emily d’aborder son histoire familiale, elle m’a proposé d’inclure une de ses tantes ou sa maman, afin qu’il puisse y avoir deux regards. Finalement ce sera sa maman, qui donnera son point de vue sur son métissage et l’histoire de ses parents.
Pour celles et ceux qui l’ignorent, lors des différentes guerres mondiales et/ou étrangères, la France a déployé de nombreux soldats, originaires de ses anciennes colonies (Afrique, Antilles, Asie, Maghreb). Beaucoup de ses hommes ont alors voyagé selon les différentes zones de guerres, et ont eu des parcours de vie conséquents.
Pour ma part, j’avais souvent entendu parler de soldats africains ayant épousé des femmes allemandes ou asiatiques durant les divers conflits mondiaux. Mais je n’avais jamais entendu parler de ces soldats antillais, qui ont eu à construire leur vie à travers ces tragédies.
Aussi, je tiens à préciser qu’il existe plusieurs communautés asiatiques (indiens, chinois, japonais, vietnamiens) qui sont établies aux Antilles françaises depuis la fin des années 1850. Ces derniers étant arrivés après l’abolition de l’esclavage, pour compenser la main d’oeuvre dans les plantations.
Leur histoire est alors différente des asiatiques venus s’installer aux Antilles, durant le 20ème et 21ème siècle.
Bonjour Emily, comment vas-tu ?Peux-tu te présenter ?
Bonjour, je suis Emily Floro, j’ai 24 ans. Je suis née et j’ai grandi en Martinique jusqu’à mes 18 ans puis je me suis envolée en France hexagonale pour effectuer mes études. Actuellement, j’habite à Paris.
J’ai découvert un de tes tik tok, grâce à ma belle-sœur. Un tik tok tourné vers l’histoire, et ça, on n’en voit pas souvent ! Peux-tu nous raconter l’histoire de tes grands-parents maternels ?
Mes grands-parents maternels se sont rencontrés en 1949 durant la guerre d’Indochine. Mon grand-père Roisier Anicet est Martiniquais. Il s’est engagé à l’armée à l’âge de 19 ans, il quitte la Martinique direction le Havre et ensuite, il a été affecté dans un magasin d’habillement au Vietnam. C’est dans ce magasin qu’il a rencontré ma grand-mère Bui-thi-Dam puisqu’elle y travaillait aussi. Je crois que ça a été le coup de foudre entre eux et après quelques mois de relation, ma grand-mère a donné naissance à un fils, mon oncle Gîo.
Mon grand-père a été rapatrié en France lorsque sa mission s’est terminée. Puisqu’il ne savait pas si un jour, il retournerait au Vietnam, il a laissé derrière lui ma grand-mère et son fils… Puis finalement, son cœur le poussera à retourner au Vietnam. Il sera affecté à une mine de charbon, où les conditions de travail étaient assez difficiles pour lui. Mais il avait retrouvé ma grand-mère, et ils ont vécu ensemble au Vietnam plus de 15 ans.
Soldats noirs-américains durant la guerre d’Indochine (1946-1954). Ces soldats combattaient aux cotés de soldats antillais et africains, issus de l’armée française.
À quel moment, tes grands-parents se sont retrouvés en Martinique ?
Mes grands-parents sont retournés en 1964 en Martinique.
Comment ta grand-mère a vécu le départ de son pays, et son installation en Martinique ?
Pour ma grand-mère au début, c’était compliqué, d’abord au niveau de la langue, car elle ne parlait et ne comprenait que le Vietnamien. En Martinique, mes grands-parents habitent dans une petite commune : le Vert-pré donc en plus ce n’était pas très commun de voir une personne asiatique dans le coin. Dans les débuts, je pense qu’elle a dû se sentir seule à certains moments… Mais elle savait que mon grand-père et elle resteraient toujours soudés.
Ma grand-mère était orpheline, elle a grandi à la campagne au Vietnam, c’était une femme très débrouillarde et travailleuse. L’avantage c’est que le Vietnam et la Martinique ne sont pas si différents finalement en termes de climat, paysage, nourriture…
Finalement, ma grand-mère a vite appris le créole. C’était beaucoup plus facile pour elle que le français, puisqu’elle ne le parlait pas du tout. Elle se débrouillait plutôt bien en créole
Combien d’enfants sont nés de cette union, et sais-tu comment est-ce qu’ils ont vécu leur métissage ?
En tout, ils ont eu 9 enfants : ils ont 6 enfants qui sont nés au Vietnam et 3 enfants en Martinique, dont ma mère Joséphine qui est la benjamine de la famille.
Je sais que pour l’ainé de la famille, mon oncle Gîo, ça a été compliqué au début, puisqu’il avait 11 ans quand ils sont retournés en Martinique. Il parlait uniquement le vietnamien.
Donc il a du tout réapprendre à l’école avec des enfants plus petits que lui. À l’époque, ce n’était pas commun de voir des enfants métissés avec des yeux bridés, donc il y avait aussi un peu le regard des autres.
Concernant ma mère qui est née en Martinique, elle a bien vécu son métissage. Les mentalités avaient déjà évolué lorsque ma mère allait à l’école, donc elle n’a pas subi de moqueries. Par contre, lorsque ma mère était adolescente, je sais que ça l’embêtait un peu quand ma mamie lui parlait uniquement vietnamien. Car elle se sentait différente des autres, d’ailleurs dans ces moments-là, elle répondait uniquement en créole. Et puis finalement avec les années, elle m’a dit qu’elle regrette, et qu’elle aurait dû plus pratiquer son vietnamien. Maintenant, elle prend des cours pour se perfectionner (lol)
As-tu connu tes grands-parents ? Si oui, quels étaient tes liens avec eux ? Qu’ont-ils appris de leur histoire ?
Oui, j’ai eu la chance de connaître mes grands-parents, on se voyait régulièrement. J’ai toujours eu énormément de respect pour eux et leur histoire. Mon papi était plutôt pudique, mais j’ai toujours pu sentir qu’il était fier de tous ses enfants et petits-enfants. Il m’a toujours soutenu et encouragé dans tous mes projets.
J’étais aussi très attachée à ma grand-mère. Elle nous gâtait beaucoup, elle était toujours aux petits soins avec nous quand on lui rendait visite. Quelques fois, elle me parlait en vietnamien alors qu’elle savait que je ne comprenais pas, et ça l’amusait.
L’histoire de mes grands-parents m’a clairement aidé à construire la jeune femme que je suis. Dans la famille, on a été élevés dans la tolérance, le respect des autres et surtout l’ouverture d’esprit. Mes grands-parents n’ont jamais empêché à aucun de leurs enfants de poursuivre leurs rêves et d’être libres, il n’y avait pas de mauvais jugement. C’est cette éducation que je souhaite transmettre à mes enfants un jour.
Et toi comment est-ce-que tu te positionnes dans toute cette identité ? As-tu toujours été au courant de ces origines ? Que réponds-tu lorsqu’on te demande d’où tu viens ?
J’ai toujours été au courant de mes origines, mais à vrai dire, je ne me sentais pas « différente ». Je pense que je ne me rendais pas compte réellement de ce métissage, car c’était une normalité pour moi.
Chez mes grands-parents maternels, je mangeais du bo-bun, tandis que chez mes grands-parents paternels, c’était typiquement antillais (lol), et pour moi, c’était normal. Lorsqu’on me demande d’où je viens, je dis que je suis Martiniquaise, car j’ai grandi en Martinique, c’est ma culture, mon chez moi, ensuite j’explique que j’ai des origines vietnamiennes du côté de ma mère.
Et toi de ton côté, quels sont tes liens avec le Vietnam ? Y as-tu déjà été ?
Oui, j’ai déjà été au Vietnam et c’était beaucoup d’émotion…
J’ai un oncle qui vit au Vietnam. Lorsque mes grands-parents étaient encore au Vietnam, à sa 3ème grossesse, ma grand-mère a accouché et ne savait pas qu’elle attendait des jumeaux. C’était un hôpital de fortune, et ma mamie, qui n’avait pas suffisamment de lait, avait sa voisine de chambre qui venait de perdre son bébé. Ma mamie a été très touchée, et a décidé de confier son fils (mon oncle Luong) à cette dame. Donc mon tonton a grandi et vécu toute sa vie au Vietnam jusqu’à aujourd’hui.
En allant au Vietnam, j’ai pu rencontrer ma famille, mes cousins et cousines. J’ai été dans le village où ont vécu mes grands-parents. C’est bizarre, car j’ai eu cette sensation d’être un peu comme chez moi en Martinique, avec les paysages, le climat et la cuisine. Être sur le sol vietnamien au début, c’était comme si on vivait un rêve, on y a été avec toute la famille, dont mes grands-parents, donc c’était magique. Pour moi, c’est un peu mon pays de cœur.
Après m’être rapproché d’Emily, elle m’indique qu’elle aimerait que le point de vue de X (soit sa maman ou une de ses tantes) soit inclus dans cet entretien. En effet, mère et fille où tante et nièce, n’ont pas le même parcours, ni le même regard sur cette histoire familiale. Nous allons donc continuer l’entretien avec sa maman Joséphine.
Bonjour, comment allez-vous ? Quel est votre parcours ?
Bonjour, je suis Joséphine Floro, j’ai 53 ans, et je suis née en Martinique au Robert. J’ai vécu toute mon enfance et mon adolescence au Vert pré, jusqu’à mon départ à Londres pour mes études. Actuellement, je suis agent d’accueil aéroport en Martinique.
Vous êtes issu d’une relation entre un homme noir caribéen, et une femme vietnamienne. Que savez-vous de l’histoire de vos parents ?
Mes parents se sont rencontrés au Vietnam après que mon père se soit engagé à l’âge de 19 ans, à l’armée française. Ils se sont mariés et ont eu 6 de mes frères et sœurs.
Mon père ayant le mal du pays, à souhaité être rapatrié, mais ma mère qui ne connaissant rien de la Martinique, était réticente à quitter le Vietnam. Finalement, ils sont tous revenus en 1964, laissant derrière eux, un de mes frères, jumeaux et ma soeur. Il avait été confié à un couple d’amis vietnamiens.
Je suis née 5 ans plus tard (1969). J’ai rencontré mon frère resté au Vietnam pour la première fois en Martinique, quand mes parents ont fait de très longues démarches afin qu’il puisse nous rendre visite, j’avais alors 19 ans.
Comment avez-vous vécu votre métissage ?
J’ai vécu mon métissage à travers le regard des autres. Je ne me sentais pas différente. Quand j’accompagnais ma mère lors de ses sorties, je faisais l’interprète de manière tout à fait naturelle. Je ne me posais pas de questions. Ma double culture était ce qu’il y avait de plus normal pour moi.
Avez-vous des liens avec l’Asie, notamment le Vietnam? votre mère avait-elle préservé sa culture même loin de son pays ?
Ma mère nous parlait toujours en vietnamien, même si nous répondions en créole. Je suis donc familiarisée avec cette langue, bien que je ne sache pas la parler parfaitement. Je peux soutenir une petite conversation de base.
Aujourd’hui, j’ai pris conscience de l’importance d’apprendre le Vietnamien et j’ai mis en place une méthode d’apprentissage. Cela me permet d’échanger avec ma famille au Vietnam. À la maison, nous mangions aussi bien vietnamien qu’antillais. Nous écoutions la musique antillaise et vietnamienne. Les deux cultures étaient vécues au même rythme et mon père parlait couramment le vietnamien.
Transmettez-vous ce métissage au quotidien auprès de votre descendance ?
De manière plutôt inconsciente, je transmets à mes enfants les mêmes valeurs que m’ont transmises mes parents. Le respect, la tolérance, la valeur du travail, la gentillesse. Pour moi, mon métissage dont j’ai pris conscience tardivement, m’a appris à accepter l’autre avec nos différences. C’est la porte vers une grande humanité.
Au final, qu’est-ce-que vous en tirez de votre histoire familiale ?
De manière générale, notre histoire familiale est une force, on se construit avec. J’ai eu la chance d’avoir une famille très aimante, néanmoins très pudique où le respect et la tolérance sont des piliers. Mes parents sont des exemples de résilience, de force et d’abnégation. Ce sont ces valeurs parmi tant d’autres qu’ils nous ont transmis et que je transmets à mon tour.
Question bonus, savez-vous si votre père a reçu une distinction quelconque en tant que soldat ?
De par son parcours à l’armée française, mon père n’a pas eu de distinction. Mais c’est tout à son image et aujourd’hui à son honneur. Mes parents étaient d’une discrétion exemplaire.
Merci à Emily et à sa maman Joséphine pour leur disponibilité. Mes pensées vont pour Roisier et Bui-Thi-Dam ♥️🌹
En tant qu’antillaise, il y a énormément d’éléments dans l’histoire des Antilles, et de la région Caraïbe, que je ne savais pas. C’est à l’âge adulte, que je me suis mise à chercher et à comprendre davantage, sur les différents peuplements des territoires caribéens.
Comme beaucoup d’antillais d’ascendance noire et africaine, j’ignorais que dans une seule et même population noire, il y avait eu plusieurs vagues d’arrivées. Je m’explique, il y avait les esclaves africains arrivés avant 1848, et des travailleurs engagés africains arrivés après 1848. Mais quelle est la différence entre ces deux vagues de peuplement ? La différence, c’est que les esclaves africains arrivés avant 1848, venaient des différentes régions d’Afrique, et ont leur enlevait systématiquement leurs noms, prénoms, traditions… Ils avaient simplement des numéros/matricules pour les désigner, ils étaient vendus à des propriétaires, et ils étaient surtout officiellement reconnus en tant qu’esclave travaillant dans des plantations.
Or, pour les africains arrivés après 1848, ces derniers sont donc arrivés aux Antilles Françaises après l’abolition de l’esclavage. À cette période, l’esclavage étant aboli, il n’y avait plus personne pour travailler dans les plantations. Les autorités coloniales ont alors envisagé de faire venir des travailleurs engagés étrangers (africains, asiatiques et européens), qui viendraient travailler dans le cadre d’un contrat (5 ans).
C’est comme cela que des travailleurs engagés originaires du Congo, débarqueront en Guadeloupe et en Martinique à partir de 1857. Comme pour leurs prédécesseurs, ils arrivent à bord de plusieurs navires ou les passagers sont à la fois des adultes (hommes et femmes) ainsi que des enfants.
Selon les historiens, 15 121 congolais sont arrivés en Guadeloupe jusqu’en 1851, et 10 521 sont arrivés en Martinique, jusqu’en 1862. Ils seront logés dans les anciennes habitations des anciens esclaves, et ils travailleront pour les anciens propriétaires.
Normalement, selon les contrats qui ont été établis, ces derniers devaient travailler un temps puis retourner en Afrique, une fois le contrat terminé. Cependant, une bonne majorité restera en Guadeloupe et en Martinique. Les billets de retour étants trop chers et n’ayant pas forcément beaucoup économisé, les congolais n’ont pas eu cette opportunité de retourner chez eux. C’est une population qui a alors finit par s’installer définitivement dans leur pays d’accueil, et ils se sont fondus dans la société antillaise.
De plus, lorsqu’ils venaient d’arriver sur ces territoires, ils ont souvent fait l’objet de moqueries de la part de la société noire créole (les descendants d’esclaves africains déjà installés depuis des générations). En effet, pour la population locale, l’Afrique restait un territoire inconnu avec beaucoup de préjugés et de mépris. Les congolais ne comprenaient par exemple pas le créole et ils tentaient de préserver leurs propres traditions également (gastronomie, musique, danse, cultes…).
Néanmoins, les générations ont passé et les travailleurs congolais sont une partie intégrante des sociétés antillaises actuelles. Premièrement, la population locale ne fait plus forcément de distinction. Deuxièmement, il y a un grand nombre de guadeloupéens et de martiniquais qui ont probablement des ancêtres KONGO/NÈG KONGO (c’est comme cela qu’on les appelait), mais qui ne le savent pas. Tout simplement parce que la transmission ne s’est peut-être pas faite au fil des générations.
De cette histoire, il reste principalement plusieurs noms de famille qui existent encore dans les deux îles. Des patronymes qui sont donc portés par les descendants : Massembo, Goma, Moanda, Angloma…
Alors comme je ne fais pas les choses à moitié, je ne me suis pas contenté de vous rédiger un simple article. Grâce à la page Instagram du site, j’ai tenu à faire mes propres recherches, afin de retrouver des éventuels descendants de Kongo aux Antilles françaises. Plusieurs d’entre-vous m’ont alors répondu, et ont accepté de témoigner ici.
Je les remercie d’avance, et je vous dis à très vite pour un nouvel article. Merci à Axel, Noëlla, Pascaline et Orlane pour leurs récits et leurs archives.
AXEL
Je m’appelle Axel et je suis descendant de travailleurs congolais, du côté de ma mère. Mon premier ancêtre Kongo avait pour nom de famille Kalanda. On le surnommait Jean, il était père de deux enfants dont Jeannille et il travaillait dans l’habitation Bologne à Saint-Claude. Malheureusement, je n’ai pas plus d’informations que ça. Mon arrière-grand-mère Stéphanie qui était l’arrière-petite-fille de cet homme, n’a aussi pas plus d’informations. Elle est toujours vivante, mais puisqu’elle a perdue sa maman Marie-Celestine (fille de Jean Kalanda) à l’âge de 8 ans, elle n’a pas eu le temps d’en savoir plus. De mes dernières recherches, le fief des Kalanda reste la ville de Saint-Claude en Guadeloupe.
NOËLLA
Je m’appelle Noëlla et mon arrière-arrière-arrière-grand-père était un engagé du Congo. Ce dernier est arrivé après l’abolition de l’esclavage, et il s’appelait Jean Makaïa (à l’origine, ça s’écrivait Makaya, puis le nom a été modifié). Je n’ai pas plus d’informations, mais je sais qu’il est enterré au cimetière de la ville du Moule (Nord de la Guadeloupe). Son fils qui était le grand-père maternel de ma maman travaillait en tant que contremaître à l’Usine Gardel (je crois qu’aujourd’hui, c’est là où se trouvent les activités de Damoiseau). Ainsi, il a épousé une femme de la famille Ramier.
Après les dires de ma grand-mère, j’ai effectué mes propres recherches de mon côté. J’ai alors tapé le nom Makaïa dans la base de recherche du site Anchoukaj, et je suis alors tombé sur une liste de travailleurs engagés du Congo. Je ne possède malheureusement pas de photos de cet aïeul venu du Congo, mais j’ai une photo de son fils Jean Makaïa.
Pascaline
Je m’appelle Pascaline, et je suis descendante d’engagés du Congo du côté de mon père martiniquais. Premièrement, les deux parents de mon grand-père paternel Antoine Mi-Poudou, sont tous les deux des descendants de familles immigrantes africaines. Son père était un Mi-Poudou et sa mère une Moussanga. Mon arrière-grand-mère Adélaïde MOUSSANGA est issue d’une famille d’immigrants africains, enrôlés avec un contrat de 10 ans. Ayant fait des recherches généalogiques, j’ai été amené à me rendre à Aix-en-Provence pour consulter des archives. Ainsi, je suis tombée sur des cartons d’archives, avec l’histoire de l’immigration africaine en Martinique après l’abolition de l’esclavage. J’ai pu retrouver la liste des noms des navires, les numéros des immigrants, le nombre de convois…
Le grand-père paternel de Pascaline, Antoine Mi-Poudou
Puis nous avons enfin Orlane, une énième descendante d’engagés congolais
Je m’appelle Orlane Louemba, j’ai 34 ans et je vis en Essonne en région parisienne. Ma famille est originaire du François en Martinique. Je n’ai pas beaucoup d’éléments, mais selon les anciens de ma famille, nous descendons de deux frères Louemba qui étaient tous deux originaires du Congo. Ils sont arrivés en Martinique afin de travailler dans la mécanique et ils ne sont jamais retournés en Afrique. Ils sont restés en Martinique jusqu’à leur mort.
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, voici un lien qui retrace en quelques lignes, les différentes immigrations aux Antilles :